La disparition des actes administratifs unilatéraux est longtemps demeurée le parent pauvre du droit administratif. Les conditions de l’entrée en vigueur, les modalités procédurales d’adoption des actes, le contrôle des exigences de forme et de fond ont bien plus mobilisé l’attention du juge et de la doctrine. Cette situation peut être expliquée par le fait que l’essentiel des recours devant le juge de l’excès de pouvoir tendent à faire annuler un acte qui vient d’être adopté. À l’inverse, une fois l’acte entré en vigueur, sa disparition poserait, a priori, moins de problèmes.

Si, quantitativement, cette situation est compréhensible, qualitativement, lorsque des problèmes juridiques liés à la disparition des actes administratifs unilatéraux émergent, ils présentent souvent une complexité importante. La disparation naturelle, en quelques sortes, de l’acte est moins crispante. Un acte peut cesser de produire des effets lorsque l’action qu’il prescrit est entièrement exécutée. Il peut également disparaître naturellement lorsque les motifs qui le fondent ont disparu. Les dispositions qu’il supporte peuvent enfin être modifiées ou abrogées par l’autorité compétente. Mais, en parallèle, il existe de nombreuses situations dans lesquelles l’administration doit pouvoir retirer un acte soit parce qu’il est inexact, soit parce qu’il est illégal ab initio, soit parce que l’administration a été trompée.

Le problème réside dans le fait que l’acte administratif unilatéral est exécutoire dès que les modalités de publicité, publication ou notification selon qu’il s’agit d’un acte réglementaire ou individuel et, le cas échéant, concernant les collectivités territoriales, de transmission au contrôle de légalité ont été satisfaites. De la sorte, l’acte administratif unilatéral présente des effets dès son entrée en vigueur. Un retrait correspond à une annulation rétroactive de l’acte, ce qui implique que ses effets passés doivent être également annulés. Cette hypothèse est la plus problématique au regard de la sécurité juridique. Une abrogation, elle, ne vaut que pour l’avenir, mais, dans certaines situations, cette disparition peut porter atteinte également à une situation juridique établie. Dans tous les cas, il est apparu nécessaire de différencier le régime de disparition des actes selon qu’ils modifiaient ou non la situation juridique individuelle des administrés. Dans la mesure où la disparition de l’acte peut porter atteinte à une situation acquise, le critère dégagé fut fondé sur le caractère créateur de droits (CE, 3 novembre 1922, Dame Cachet).

Il est revenu en premier lieu au juge d’assurer la conciliation entre respect de la légalité et préservation de la sécurité juridique. S’il s’est saisi du problème, les solutions et leurs évolutions qu’il a apporté se sont avérées à la fois inefficaces et lacunaires (I). En 2015, profitant de la systématisation et de la mise en cohérence de la procédure administrative non contentieuse, par la création d’un Code des relations du public avec l’administration (CRPA), le législateur a assuré une mise en cohérence du droit régissant la disparition volontaire des actes administratifs unilatéraux (II).

  • I - Une évolution inefficace et lacunaire du droit prétorien
    • A - Une première pierre inefficace
    • B - Une réforme inaboutie : l’arrêt Ternon
  • II - Une mise en cohérence par le législateur
    • A - Une réforme législative bienvenue
    • B - La persistance d’hypothèses non prévues par les textes
  • CE, ass., 26/10/2001, Ternon ; Code des relations du public avec l’administration

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