Introduction

L’exécution des budgets locaux s’effectue, sous réserve de certaines adaptations, selon des process relativement proches de ceux qui existent pour les finances de l’Etat. La mise en œuvre desdits budgets fait, en effet, appel aux mêmes catégories d’agents et s’opère selon les mêmes procédures.

Ces budgets sont, ainsi, exécutés par les traditionnels ordonnateurs et comptables publics, dont les fonctions sont, ici aussi, séparées. Les premiers décident des opérations de recettes et de dépenses, tandis que les seconds sont les seuls habilités à manier les deniers publics. Au niveau local, les fonctions d’ordonnateur sont confiées aux exécutifs locaux, quand celles de comptable public relèvent d’agents de la Direction générale des finances publiques (DGFIP).

A l’instar de ce qui a cours au niveau national, les procédures d’exécution sont caractérisées par un rythme à quatre temps : les trois premiers relèvent de l’ordonnateur, quand le quatrième est à la charge du comptable public. Et, de la même façon, leurs modalités d’application varient selon qu’il s’agit de dépenses ou de recettes.

Il convient, donc, d’étudier, dans une première partie, les agents d’exécution des budgets locaux (I) et d’analyser, dans une seconde partie, les procédures d’exécution desdits budgets (II).

I - Les agents d'exécution des budgets locaux

Les budgets locaux sont exécutés par les ordonnateurs (A) et les comptables publics (B). Comme pour les finances de l’Etat, ces deux fonctions sont strictement séparées.

A - Les ordonnateurs locaux

Les missions des ordonnateurs locaux sont, relativement, proches de celles des ordonnateurs compétents sur le plan national (1). En revanche, ces fonctions sont occupées par un nombre beaucoup plus limité de personnes (2).

1 - Les missions des ordonnateurs locaux

Les ordonnateurs locaux exercent des missions qui couvrent une large partie du processus d’exécution des recettes et des dépenses, à l’exclusion du maniement des deniers publics. Comme au niveau national, ces missions s’organisent selon un triptyque procédural dont la teneur varie, sensiblement, selon qu’il s’agit des dépenses ou des recettes.

En matière de dépenses, les ordonnateurs engagent, c’est-à-dire créent ou constatent une obligation, liquident la dette, puis l’ordonnancent. Ils disposent, en la matière, d’un large pouvoir d’appréciation : ils ne sont, en effet, pas obligés de dépenser les crédits votés par l’assemblée délibérante et sont libres du moment et du montant de la dépense (sans, bien sûr, dépasser, le montant de l’autorisation budgétaire). Les ordonnateurs locaux voient, toutefois, leur liberté de décision limitée par l’existence de dépenses obligatoires. Certaines dépenses des collectivités locales doivent, en effet, être obligatoirement inscrites au budget : il s’agit, notamment, des dépenses liées aux secteurs de compétence de la collectivité (par exemple, les lycées pour les régions), des dépenses de personnel, des intérêts d’emprunt, du remboursement en capital de la dette ou, encore, des indemnités de fonction des élus. A défaut d’une inscription au budget, le préfet peut saisir la Chambre régionale et territoriale des comptes qui demande à la collectivité de rectifier l’oubli et, à défaut, autorise le préfet à les y inscrire d’office.

En matière de recettes, les ordonnateurs constatent, liquident et ordonnent le recouvrement des droits dont la collectivité est créancière. Il est, ainsi, établi un titre de perception pour toutes les recettes relatives aux produits du domaine, services rendus, produits financiers ou encaissement des emprunts. En revanche, ils n’interviennent pas dans le recouvrement des impôts locaux : l’ordre de recouvrer est, en effet, émis par les services de la Direction générale des finances publiques.

Il faut, enfin, noter que, comme au niveau national, les ordonnateurs locaux disposent, parfois, d’un pouvoir d’exécution lorsqu’ils interviennent dans le cadre d’une régie de recettes ou d’avances. Concrètement, un régisseur est autorisé à percevoir certaines ressources ou à payer certaines dépenses afférentes à des opérations simples et répétitives. Ce système, qui permet de se passer de l’intervention d’un comptable, vise à faciliter le fonctionnement des services publics. Le régisseur reste, cependant, sous le contrôle du comptable qui doit lui donner son agrément lors de sa nomination.

Dans l’exercice de l’ensemble de ces missions, les ordonnateurs doivent enregistrer les opérations qu’ils effectuent et tenir une comptabilité permettant, à la fin de la période budgétaire, d’établir un état de l’activité de la collectivité appelé le compte administratif.

2 - Les catégories d’ordonnateurs

A l’inverse de ce qui a cours au niveau national, il n’existe pas, sur le plan local, d’ordonnateurs secondaires, mais seulement des ordonnateurs principaux. Cette fonction est occupée par le maire pour les communes, le président du conseil départemental pour les départements et le président du conseil régional pour les régions. Ces pouvoirs peuvent, cependant, être délégués à d’autres élus locaux, voire à des agents publics territoriaux, la délégation étant, simplement, de signature dans cette dernière hypothèse.

En revanche, certaines autorités peuvent, à titre exceptionnel, exercer la fonction d’ordonnateur. Il en va, ainsi, du préfet qui peut mandater d’office une dépense obligatoire si l’exécutif local n’y a pas procédé dans le mois qui suit la mise en demeure qui lui a été adressée par le représentant de l’Etat. Dans le même sens, si l’exécutif local a été déclaré comptable de fait par le juge des comptes, il est suspendu de sa qualité d’ordonnateur jusqu’à ce qu’il ait reçu quitus de sa gestion : l’assemblée de la collectivité doit, alors, confier cette mission à l’adjoint du maire dans le cas des communes ou au vice-président du conseil départemental ou régional s’il s’agit d’un département ou d’une région.

B - Les comptables des collectivités locales

A l’instar du propos relatif aux ordonnateurs, ils convient, s’agissant des comptables des collectivités locales, d’analyser leurs missions (1), ainsi que les agents qui occupent cette fonction (2).

1 - Les missions des comptables publics

Les comptables publics exercent, sur le plan local, les même missions que celles exercées sur le plan national, à savoir une mission d’exécution financière et une mission de contrôle. Ils sont, cependant, également, amenés, parfois, à effectuer une mission d’assistance auprès des exécutifs locaux.

Sur le premier point, ils sont, ainsi, chargés de tenir la comptabilité générale, de prendre en charge et d’exécuter les ordres de recouvrer et de payer qui leurs sont transmis par les ordonnateurs, d’assurer le maniement des fonds (encaissement des recettes, paiement des dépenses), d’assurer la conservation des fonds et valeurs et de conserver les pièces justificatives des opérations exécutées. C’est dans ce cadre qu’ils établissent en fin d’exercice le compte de gestion qui est l’envers du compte administratif.

Sur le second point,    les comptables publics sont, par ailleurs, chargés d’exercer un contrôle de régularité des ordres de recettes et de dépenses qui sont émis par les ordonnateurs et de refuser, le cas échéant, de les exécuter. Il s’agit d’un contrôle a priori avant l’encaissement ou le décaissement effectif. En matière de recettes, le contrôle porte sur la régularité de l’autorisation de percevoir la recette ou, encore, la régularité des réductions ou annulations d’ordres de recouvrer. En matière de dépenses, il s’agit de vérifier la qualité de l’ordonnateur, l’exacte imputation des dépenses au regard du principe de spécialité des crédits, la disponibilité des crédits, la validité de la dette (notamment, au regard de la règle du service fait) et le caractère libératoire du paiement.

En plus de ces deux fonctions, les comptables publics locaux peuvent être amenés à exercer des missions d’assistance et de conseil, notamment pour aider l’exécutif des communes de petite taille à préparer le budget communal. Cette dérogation au principe de séparation des ordonnateurs et des comptables est parfaitement admise par les textes.

2 - Les catégories de comptables publics

Les comptables publics des collectivités locales sont des agents de la Direction générale des finances publiques nommés par le ministre du budget. L’article L 1617 – 1 du Code général des collectivités territoriales dispose ainsi : « Le comptable de la commune, du département ou de la région est un comptable public de l'Etat ayant la qualité de comptable principal. Il est nommé par le ministre chargé du budget après information préalable, selon le cas, du ou des maires concernés, du président du conseil départemental ou du président du conseil régional. »

A côté de ces comptables principaux qui rendent directement leurs comptes au juge des comptes, en l’occurrence les Chambres régionales et territoriales des comptes, il existe, également, des comptables secondaires qui ne les rendent que par l’intermédiaire des comptables principaux dont ils relèvent.

II – Les procédures d'exécution des budgets locaux

Ces procédures sont organisées selon le même rythme à quatre temps, mais voient leurs modalités d’application varier selon qu’il s’agit de recettes (A) ou de dépenses (B).

A - L'exécution des opérations de recettes

La procédure d’exécution des recettes diffère selon qu’il s’agit de recettes fiscales (1) ou de recettes non fiscales (2).

1 - L’exécution des recettes fiscales

L’exécution des recettes fiscales suit à un mécanisme à quatre temps : les trois premiers relèvent de l’ordonnateur, le dernier du comptable public.

En matière fiscale, la phase à la charge de l’ordonnateur est réalisée par les services de la DGFIP. Elle se décompose en trois parties : la constatation des droits, la liquidation et l’ordonnancement.

La constatation des droits est l’opération préalable et fondamentale par laquelle la créance est arrêtée dans son principe. Il s’agit de vérifier l’existence d’une créance au profit de la collectivité locale, ce qui suppose de s’assurer que l’imposition en cause est bien prévue par les lois fiscales. C’est à ce moment, également, que l’assiette de l’impôt, c’est-à-dire la base imposable, est déterminée matériellement et juridiquement. L’ordonnateur doit, par ailleurs, s’assurer que le fait générateur de l’impôt s’est bien produit.

L’ordonnateur doit, ensuite, liquider la créance, c’est-à-dire en arrêter le montant. En matière fiscale, la liquidation suppose, la plupart du temps, d’appliquer à la base imposable le taux voté par la collectivité.

Enfin, intervient l’ordonnancement proprement dit. Cette phase relève du seul ordonnateur qui doit émettre un ordre de recettes en vertu duquel le comptable pourra recouvrer la créance.

Le comptable public doit, ensuite, prendre en charge l’ordre de recettes. Préalablement à la mise en recouvrement proprement dite, il doit procéder au contrôle de la régularité de l’ordre et vérifier, notamment, que la perception des recettes fiscales est bien autorisée pat les lois fiscales et que les réductions et annulations de recettes sont valides. Le comptable doit, ensuite, opérer le recouvrement de la créance. Il est, à ce titre, tenu d’effectuer toutes les diligences nécessaires, notamment en employant toutes les voies d’exécutions forcées à sa disposition.

2 - L’exécution des recettes non fiscales

Les recettes non fiscales, c’est-à-dire les recettes résultant, par exemple, de l’usage de services publics locaux ou de l’occupation du domaine public, sont exécutées par les collectivités territoriales elles-mêmes. La procédure fait, là encore, intervenir les ordonnateurs et les comptables.

L’ordonnateur doit, ainsi, constater la créance au profit de la collectivité, la liquider et ordonner la mise en recouvrement des droits en résultant. Cette dernière phase se traduit par l’émission d’un titre de perception indiquant la collectivité bénéficiaire, le nom et l’adresse du débiteur, ainsi que la somme due.

Le comptable public doit, ensuite, après avoir contrôlé l’autorisation de percevoir la recette, la qualité de l’ordonnateur ou, encore, l’imputation budgétaire et comptable du titre de recette, assurer le recouvrement de la recette en exerçant toutes les diligences nécessaires.

B - L'exécution des opérations de dépenses

La procédure d’exécution des dépenses se décompose en quatre étapes. Les trois premières sont à la charge de l’ordonnateur (1), la quatrième relève du comptable public (2).

1 - Les étapes à la charge de l’ordonnateur

L’ordonnateur doit engager la dépense, la liquider et l’ordonnancer.

L’engagement de la dépense consiste, pour l’ordonnateur, à créer ou constater une obligation pesant sur la collectivité de laquelle découlera une charge. En d’autres termes, il peut s'agir du fait générateur de la dette ou de la simple constatation de l'existence d'une dette née par ailleurs. Cette phase se subdivise en deux moments. Il y a d’abord l’engagement juridique qui résulte de l’acte ou des faits, tel qu’un contrat de marché public, par lequel une obligation est mise à la charge la collectivité locale. Puis, vient l’engagement comptable par lequel l’ordonnateur affecte des crédits budgétaires à la réalisation d’une dépense particulière, ce qui suppose que celui-ci s’assure de la disponibilité des crédits et reste, également, dans la limite des autorisations accordées par l’assemblée délibérante. Si l’engagement juridique peut être le fait de personnes autres que l'ordonnateur, en revanche, l'engagement comptable relève du seul ordonnateur.

L’ordonnateur doit, ensuite, liquider la dépense. Il s’agit, ici, de vérifier la réalité de la dette, notamment en contrôlant que le service a bien été effectué en vertu de la règle du service fait, et d’en arrêter le montant. Ces opérations peuvent être réalisées matériellement par des agents publics qui ne sont pas des ordonnateurs.

Enfin, l’ordonnateur procède à l’ordonnancement qui constitue l'acte administratif par lequel est donné au comptable l'ordre de payer la dette. Cette étape relève du seul ordonnateur.

2 – L’étape à la charge du comptable public

Cette étape commence par le contrôle de la régularité de l'ordre de paiement et des pièces justificatives règlementaires qui l’accompagnent. Plusieurs éléments sont, ainsi, examinés : qualité de l’ordonnateur, bonne imputation budgétaire de la dépense, disponibilité des crédits, validité de la créance (notamment, au regard de la règle du service fait) ou, encore, caractère libératoire du paiement. Au contrôle exhaustif traditionnel, s’est, cependant, substitué, depuis le décret du 7 novembre 2012, un contrôle hiérarchisé et partenarial destiné à permettre aux services comptables de se concentrer sur les dépenses importantes et à risques : il s’agit d’un contrôle qui n’est plus systématique, mais qui est, au contraire, modulé selon une évaluation des risques et fondé sur des sondages.

Une fois ce contrôle effectué, deux hypothèses peuvent se présenter. Aucune anomalie n’est décelée : le comptable peut procéder au paiement proprement dit de la dépense. Lorsque, en revanche, une irrégularité est détectée, le comptable doit notifier à l’ordonnateur un refus de payer. A défaut de régularisation par ce dernier, le comptable doit maintenir son refus de payer, ce que l’ordonnateur peut outrepasser en procédant à une réquisition du comptable et qui a pour effet de transférer la responsabilité de la dépense sur la personne de l’ordonnateur. Le comptable requis est tenu, ensuite, de procéder au paiement, sauf dans certaines hypothèses (indisponibilité des crédits, absence de service fait, caractère non libératoire du paiement).