Le régime de l'acte administratif unilatéral

L'acte administratif unilatéral connaît, outre sa phase d'application, deux moments particulièrement importants. Le premier concerne son édiction : durant cette phase, l’administration est sou-mise à un ensemble de règles destinées à encadrer tant l’élaboration que l’entrée en vigueur de l’acte. Le second concerne sa disparition qui peut être rétroactive, on parle de retrait, ou ne valoir que pour l'avenir, on parle d'abrogation.

Vie et mort de l’acte administratif unilatéral : de son élaboration à sa sortie de vigueur (fiche thématique)

L’acte administratif unilatéral (AAU) constitue, avec le contrat, l’une des deux modalités d’action de l’Administration. L’acte administratif unilatéral est propre au droit public. Il traduit l’existence de prérogatives de puissance publique qui, elle, signe l’exorbitance du droit administratif. Cela signifie que l’administration est en mesure d’imposer unilatéralement sa volonté sous la forme d’une norme juridique. Une fois adoptés, les AAU sont exécutoires de plein droit. La sanction de leur méconnaissance peut être le fait de l’administration ou du juge, administratif ou judiciaire, y compris pénal. Cette capacité à mobiliser la violence légitime dont l’État a le monopole invite à très rigoureusement encadrer les pouvoirs de l’administration.  Cet encadrement est double : il est réalisé a priori, par la détermination des règles de droit qui conditionnent, sur la forme et dans son processus d’élaboration, l’acte administratif. C’est ce que l’on nomme la procédure administrative non contentieuse et l’entrée et la sortie de vigueur. Ces normes visent à assurer un certain nombre de garanties aux administrés : garanties que l’acte est adopté compétemment, qu’il respecte les droits de la défense, qu’il présente valablement les motifs qui le fonde etc.  Elles visent également à encadrer la façon dont l’acte peut produire ses effets et les modalités par lesquelles il cesse de les produire. La question de la validité d’un acte est fondamentale dans la mesure où elle informe l’état à un moment donné de l’ordonnancement juridique. Dans la conception de l’État de droit, l’administration est soumise à ces normes. C’est la raison pour laquelle la seconde modalité d’encadrement du pouvoir d’édiction unilatérale des normes est également encadré a posteriori, par le juge, qui peut apprécier et, le cas échéant, sanctionner, les manquements de l’administration à ses obligations procédurales. Cette seconde partie fera l’objet d’autres développements, consacrés uniquement au contrôle juridictionnel de l’administration. Pour le moment seuls nous intéresseront les considérations liées à l’encadrement a priori de la formation des AAU. 

L’obligation d’abroger les règlements illégaux (CE, ass., 03/02/1989, Cie. Alitalia)

L’administration dispose de plusieurs moyens d’actions parmi lesquels on retrouve l’acte réglementaire. Le Professeur Didier Truchet le définit comme « un acte administratif unilatéral général et impersonnel. Il s’adresse anonymement à ceux auxquels ils s’appliquent. Peu importe le nombre des intéressés (…). L’important est que l’autorité qui prend l’acte veut qu’il s’applique à tous ceux qui entrent dans son champ d’application (…). Bien sûr, seule une autorité disposant du pouvoir réglementaire peut prendre des actes réglementaires, dans la limite de sa compétence » (D. Truchet, Droit administratif, 7e Ed., Coll. Thémis, PUF, 2017, p. 247). Le gouvernement dispose notamment de ce pouvoir réglementaire, dans un cadre constitutionnel précis : la Constitution du 4 octobre 1958 opère une distinction claire entre domaine de la loi et domaine réglementaire (art. 34 et 37). L’article 21 de notre Constitution précise que, sous certaines conditions, le Premier Ministre « exerce le pouvoir réglementaire ». Il faut distinguer le règlement autonome, du règlement d’application qui est pris uniquement en appui d’un texte législatif. Aussi, conformément aux dispositions du Code de justice administrative (CJA), il faut rappeler que le Conseil d’État est notamment juge en premier et dernier ressort pour les recours dirigés contre les décrets et actes réglementaires du gouvernement (v. notamment : CJA, art. R. 311-1 2°). L’autorité réglementaire n’agit pas dans un cadre totalement libre, mais dans celui fixé par l’ensemble des normes supérieures, notamment les traités internationaux.

La disparition volontaire des actes administratifs unilatéraux (CE, ass., 26/10/2001, Ternon ; Code des relations du public avec l’administration)

La disparition des actes administratifs unilatéraux est longtemps demeurée le parent pauvre du droit administratif. Les conditions de l’entrée en vigueur, les modalités procédurales d’adoption des actes, le contrôle des exigences de forme et de fond ont bien plus mobilisé l’attention du juge et de la doctrine. Cette situation peut être expliquée par le fait que l’essentiel des recours devant le juge de l’excès de pouvoir tendent à faire annuler un acte qui vient d’être adopté. À l’inverse, une fois l’acte entré en vigueur, sa disparition poserait, a priori, moins de problèmes.