Introduction
La Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) constitue le second élément de la Contribution économique territoriale (CET). Bien que son champ d'application soit lié à celui de la Cotisation foncière des entreprises (CFE), il s'agit d'une cotisation distincte qui s'ajoute à cette dernière cotisation et obéit à des règles sensiblement différentes.
Ce qui est commun concerne, donc, le champ d’application : la CVAE s’applique, en effet, aux mêmes personnes et aux mêmes activités que celles soumises à la CFE, avec les mêmes cas d’exonération. Mais, ne sont, effectivement, redevables de cette cotisation que les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 500 000 €.
Ce qui diffère concerne, d’abord, les modalités de calcul, puisqu’ici la CVAE est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l’entreprise au cours de la période de référence. Cette fraction est déterminée par application à cette valeur ajoutée d’un taux d’imposition lui-même fonction du chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise. Quant aux formalités déclaratives et aux modalités de paiement, ensuite, elles sont propres à la CVAE : c’est, ainsi et notamment, qu’à l’inverse de la CFE, la CVAE ne fait pas l’objet d’un rôle, mais est acquittée spontanément par les entreprises.
Enfin, il convient de noter que la CVAE est supprimée à compter de 2027 (art. 79 loi n° 2023-1322 du 29/12/2023). L'année 2026 sera, donc la dernière année au titre de laquelle cette cotisation sera perçue.
Il convient, donc, d’étudier le champ d’application de la CVAE (I), le calcul de la CVAE (II) et les modalités d’établissement de la CVAE (III).
I - Le champ d'application de la CVAE
Le champ d’application de la CVAE obéit à certains principes (A) et est affecté par des mesures d’exonération (B).
A - Les principes
Le champ d’application de la CVAE est le même que celui de la CFE. Une différence existe cependant : elle réside dans une condition liée au chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise. La CVAE est, ainsi, due :
- par les personnes physiques ou morales, ainsi que par les sociétés non dotées de la personnalité morale,
- qui exercent une activité imposable à la CFE,
- et dont le chiffre d’affaires hors taxe est supérieur 152 500 € : néanmoins, l’application d’une mesure de dégrèvement fonction du montant de chiffre d’affaires aboutit à ne soumettre effectivement à la CVAE que les personnes dont le chiffre d’affaires hors taxe est supérieur ou égal à 500 000 € ; dès lors, les entreprises peuvent être classées comme suit :
- les personnes dont le chiffre d’affaires est inférieur ou égal à la 152 500 € ne sont pas assujetties à la CVAE,
- les personnes dont le chiffre d’affaires est supérieur à 152 500 € et inférieur à 500 000 € sont assujetties à la CVAE sans en être redevables,
- les personnes dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 500 000 € sont des assujetties redevables de la CVAE.
B – Les exonérations
Le régime des exonérations varie selon qu’il s’agit d’exonérations de plein droit ou d’exonérations facultatives.
L’ensemble des exonérations de plein droit applicables en matière de CFE, c’est-à-dire les exonérations non liées à une délibération des communes ou des EPCI bénéficiaires de cette cotisation, s’appliquent à la CVAE, qu’elles soient permanentes ou temporaires.
En revanche, depuis le 1er janvier 2024, les communes, les EPCI et les départements n'ont plus la possibilité de prendre des délibérations relatives à l'application à la CVAE, pour la fraction de la valeur ajoutée taxée à leur profit, des exonérations facultatives prévues en matière de CFE. Les délibérations en faveur de l'application de l'exonération à la CVAE - ou les décisions de ne pas s'opposer à l'application de l'exonération, selon le dispositif dont il s'agit - prises avant cette date par ces collectivités continuent à produire leurs effets jusqu'en 2026. Les entreprises pouvant bénéficier d'une exonération de CVAE en application de ces délibérations ou décisions doivent en faire la demande.
II – Le calcul de la CVAE
La CVAE est égale à la valeur ajoutée produite par l’entreprise au cours de la période de référence multipliée par un taux d’imposition qui dépend du chiffre d’affaires réalisé. Il convient, donc, de déterminer la période de référence (A), ainsi que les modalités de calcul du chiffre d’affaires et de la valeur ajoutée (B) et celles du taux d’imposition (C).
A - La période de référence
La CVAE est déterminée en fonction du chiffre d’affaires réalisé et de la valeur ajoutée produite :
- au cours de l’année d’imposition (exercice = année civile) ou au cours du dernier exercice de 12 mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l’année civile,
- au cours de l’exercice clos au cours de l’année d’imposition s’il est d’une durée de plus ou moins de 12 mois,
- entre le premier jour suivant la fin de la période retenue pour le calcul de la CVAE de l’année précédente et le 31 décembre de l’année d’imposition si aucun exercice n’est clôturé au cours de l’année d’imposition,
- au cours des différents exercices si plusieurs exercices sont clôturés au cours de l’année d’imposition.
Dans les trois dernières hypothèses, le chiffre d’affaires est corrigé pour correspondre à 12 mois pour l’appréciation du seuil d’assujettissement à la CVAE, la détermination du taux d’imposition, l’application du dégrèvement complémentaire en faveur des petites entreprises. En revanche, cette correction n'est pas effectuée pour le calcul de la cotisation, même si la période de référence retenue n'est pas de douze mois.
B – Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée
Le chiffre d’affaires de l’entreprise permet de déterminer si l’entreprise se situe ou non dans le champ d’application de la CVAE, ainsi que le taux effectif de la CVAE.
La valeur ajoutée produite au cours de la période de référence constitue la base d’imposition de la CVAE. Elle est déterminée à partir du chiffre d’affaires, majoré d’autres produits et diminué de certaines charges. A la différence du chiffre d’affaires, en cas d’exercice de plus ou moins de 12 mois clos au cours de l’année d’imposition, aucun ajustement n’est effectué pour correspondre à un exercice de 12 mois.
Les modalités de calcul du chiffre d’affaires et de la valeur ajoutée peuvent être exposées pour trois types d’entreprises : la généralité des entreprises (1), les BNC soumis à une comptabilité de caisse (2) et les revenus fonciers (3).
1 – La généralité des entreprises
a / Le chiffre d’affaires correspond à la somme des produits suivants :
- ventes de produits fabriqués, de marchandises et de prestations de services,
- redevances pour concessions de brevets, de licences, de marques, de logiciels, …
- plus-values de cession d’immobilisations corporelles et incorporelles lorsqu’elles se rapportent à l’activité courante et normale,
- refacturations de frais inscrites au compte de transfert de charges.
b / La valeur ajoutée est égale à la différence entre :
- des produits :
- le chiffre d’affaires défini précédemment,
- les autres produits de gestion courante (à l’exception de ceux déjà pris en compte dans le chiffre d’affaires),
- la production immobilisée limitée au montant des charges déductibles de la valeur ajoutée,
- les subventions d’exploitation,
- la variation positive des stocks,
- les transferts de charges déductibles de la valeur ajoutée (autres que ceux déjà pris en compte dans le chiffre d’affaires),
- les rentrées sur créances amorties lorsqu’elles se rapportent au résultat d’exploitation,
- et des charges :
- les achats de marchandises et de matières premières,
- la variation négative des stocks,
- les services extérieurs, à l’exception des loyers ou redevances afférents aux biens corporels pris en location ou en sous-location pour une durée de plus de 6 mois ou en crédit-bail,
- les taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées, les contributions indirectes et la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques,
- les autres charges de gestion courante,
- les dotations aux amortissements pour dépréciation afférentes aux biens corporels donnés en location ou en sous-location pour une durée de plus de 6 mois ou donnés en crédit-bail ou faisant l’objet d’un contrat de location-gérance,
- les moins-values de cession d’éléments d’immobilisations corporelles et incorporelles se rapportant à une activité courante et normale.
2 – Les BNC soumis à une comptabilité de caisse
a / Le chiffre d’affaires correspond au montant HT des honoraires ou des recettes encaissées (diminué des rétrocessions) et des gains divers (aides et subventions de toute nature, par exemple).
b / La valeur ajoutée est égale à la différence entre le chiffre d’affaires défini précédemment et les dépenses de même nature que les charges admises en déduction de la valeur ajoutée pour la généralité des entreprises.
3 – Les revenus fonciers
a / Le chiffre d’affaires est égal aux recettes brutes hors taxes (loyers encaissés, dépenses mises par convention à la charge du locataire, recettes brutes diverses).
b / La valeur ajoutée correspond à la différence entre le chiffre d’affaires défini précédemment et les charges de la propriété déductibles des revenus fonciers, à l’exception des impôts et taxes (autres que ceux incombant normalement à l'occupant) et des intérêts d'emprunt.
Il convient, pour terminer, de noter l’existence d’une mécanisme de la plafonnement de la valeur ajoutée qui concerne l’ensemble des contribuables. Ainsi, la valeur ajoutée ne peut excéder un pourcentage du chiffre d’affaires qui est de :
- 80 % pour les contribuables dont le chiffre d’affaires est inférieur ou égal à 7 600 000 €,
- 85 % pour les contribuables dont le chiffre d’affaires est supérieur à 7 600 000 €.
C – Le taux d'imposition
Le taux de la CVAE est de 0,28 % en 2024. Toutefois, il ne s’agira du taux réel supporté par les entreprises que pour celles d'entre elles dont le chiffre d'affaires est égal ou supérieur à 50 000 000 €. En effet, les autres entreprises bénéficient d'un dégrèvement automatique (dégrèvement dit « barémique ») qui varie en fonction du chiffre d’affaires. Ce dégrèvement aboutit en pratique à une exonération de cotisation lorsque le chiffre d’affaires est inférieur à 500 000 € et à une taxation à taux variable (de 0 % à 0,28 %) selon le chiffre d’affaires pour les autre entreprises. Compte tenu de l'imputation de ce dégrèvement, les entreprises acquittent, donc, en fait, une CVAE correspondant à un taux effectif souvent inférieur à 0,28 % de la valeur ajoutée.
Enfin, les entreprises dont le chiffre d'affaires hors taxes est inférieur à 2 000 000 € bénéficient d'un dégrèvement dont le montant est de 188 € pour les impositions dues au titre de 2024, 125 € pour celles dues au titre de 2025 et 63 € pour celles dues au titre de 2026.
III – L'établissement de la CVAE
Trois points doivent retenir l’attention : l’annualité de la CVAE, les obligations déclaratives et le paiement de la CVAE.
a / L’annualité de la CVAE : la CVAE est due par le redevable qui exerce l’activité au 1° janvier de l’année d’imposition ; par exception à ce principe, en cas d'apport, de cession d'activité, de scission d'entreprise ou de transmission universelle du patrimoine intervenant au cours de l’année d’imposition, la CVAE est également due par le redevable qui n’exerce aucune activité imposable au 1° janvier de l’année et auquel l'activité est transmise ; il en va ainsi que ce redevable existe ou non au 1° janvier, le but étant d’éviter une interruption d'imposition pour les activités transmises qui ont été exercées sans discontinuer.
b / Les obligations déclaratives : les entreprises dont le chiffre d’affaires hors taxe est supérieur à 152 500 € doivent déclarer par voie électronique le montant de la valeur ajoutée sur un formulaire n° 1330 – CVAE ; légalement, cette déclaration doit être déposée au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1° mai de l’année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due ; toutefois, l’administration accorde aux entreprises souscrivant leur déclaration par voie électronique un délai supplémentaire de 15 jours calendaires pour accomplir leur obligation déclarative.
c / Le paiement de la CVAE : la CVAE doit être acquittée spontanément par les entreprises dans les délais légaux et par télérèglement selon deux modalités :
- les entreprises dont la CVAE de l’année précédant celle de l’imposition est supérieure à 1 500 € sont tenues au versement de deux acomptes en cours d’année (15 juin et 15 septembre) : les acomptes sont égaux à 50 % de la CVAE calculée d’après la valeur ajoutée mentionnée dans la dernière déclaration de résultat exigée à la date de paiement des acomptes ; l’année suivant celle de l’imposition, l’entreprise doit procéder à la liquidation définitive de la CVAE sur une déclaration n° 1329 – DEF à déposer au plus tard le deuxième jour suivant le 1° mai ; l’entreprise doit, alors, acquitter le solde de CVAE ; si, au contraire, la liquidation définitive fait apparaître que les acomptes versés sont supérieurs à la cotisation effectivement due, l'excédent, déduction faite des autres impôts directs dus par le redevable, est restitué à ce dernier dans les soixante jours suivant la date limite de dépôt de la déclaration.
- les entreprises dont la CVAE de l’année précédente est inférieure à 1 500 € sont dispensées du paiement des acomptes.
