Les buts de l'administration

L'administration exerce deux grandes missions : le service public et la police administrative. Activités d’intérêt général prises en charge par des personnes publiques ou par des personnes privées, les services publics visent à procurer des biens ou des services aux administrés. La police administrative a, elle, pour but d'assurer un certain ordre social en veillant à concilier la préservation de l'ordre public et le respect des libertés publiques.

La qualification du service extérieur des pompes funèbres (TC, 20/01/1986, SA Roblot ; CE, avis, 19/12/1995)

La question de la compétence juridictionnelle et du droit applicable est consubstantielle de l’histoire du droit administratif. L’arrêt Blanco du Tribunal des conflits du 08/02/1873 avait semblé résoudre le problème en faisant du service public la clé pour déterminer la compétence du juge administratif. C’était sans compter l’apparition de services publics industriels et commerciaux (SPIC) majoritairement soumis au droit privé et à la compétence du juge judiciaire (TC, 22/01/1921, Société commerciale de l’ouest africain, dit Bac d’Eloka). S’est, donc, posée, à compter de ce moment, la question de la distinction entre ces services publics et les services publics administratifs (SPA) pour déterminer le juge compétent et le droit applicable. C’est cette question qui est en cause dans les deux affaires étudiées à propos du service extérieur des pompes funèbres.

L’épidémie de Covid-19 et la police administrative (fiche thématique)

Par le passé, plusieurs épidémies ont déjà secoué notre planète : la peste noire, la grippe espagnole au sortir de la 1re Guerre mondiale, la variole ou encore la grippe aviaire plus récemment. La loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique a introduit dans le Code de la santé publique un chapitre intitulé « Menace sanitaire grave », renforcé avec la loi du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur.

Le principe de « neutralité » en milieu scolaire (fiche thématique)

L’article 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 dispose que « nul ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ». Avec l’arrêt Kherouaa (CE, 2 nov. 1992, Kherouaa, n° 130394, Lebon p. 389), le Conseil d’État avait accepté de contrôler le règlement intérieur d’un établissement scolaire, en ce qu’il interdisait le port du voile aux élèves, le faisant de facto sortir de la catégorie des mesures d’ordre intérieur (MOI). Si la haute-juridiction avait pu rappeler le principe de neutralité du service public, notamment pour les agents, elle ne manquait pas de rappeler également que l’encadrement de la liberté religieuse des élèves ne doit pas mener à une interdiction générale et absolue de porter des signes distinctifs qui serait contraire à la liberté d'expression des élèves. 

Symboles religieux dans l’espace public : le principe de neutralité à la loupe du juge administratif ! (CE, 25/10/2017, Fédération morbihannaise de la libre pensée, n° 396990 ; CE, 11/03/2022, Cne de St-Pierre d’Alvey, n° 454076 et 456932)

« La loi doit protéger la foi, aussi longtemps que la foi ne prétendra pas dire la loi », disait Aristide Briand, député et rapporteur de la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Églises et de l’État (JORF du 11 déc. 1905).

Pouvoirs de polices générale et spéciale du maire à l’aune de la crise sanitaire du Covid-19 (CE Ord., 17/04/2020, Commune de Sceaux)

Comme le rappelle le Pr. Vincent Tchen, « les autorités de police administrative sont réputées prévenir une atteinte à l'ordre public ou, plus généralement, mettre fin à une situation d’illégalité. Leurs missions se distinguent donc de celles attribuées aux autorités de police judiciaire qui répriment un trouble déjà avéré ou doivent constater les infractions à la loi pénale, rassembler les preuves, et rechercher les auteurs (…). Cette distinction est nécessaire, car l'acte de police administrative est par principe soumis au respect du droit administratif, alors que les mesures prises dans le cadre d'une mission de police judiciaire sont régies par le Code de procédure pénale » (V. Tchen, « Synthèse : Polices administratives », JCl. Adm., 16 mai 2022). La police administrative apparait aujourd’hui comme un moyen d’action considérable des pouvoirs publics. Les domaines dans lesquels elle intervient, d’une manière générale, ont pour conséquence d’interroger la conciliation des mesures adoptées avec les libertés publiques.

Le droit de grève à l’épreuve de la continuité des services publics (CE, ass., 07/07/1950, Dehaene)

Le droit administratif est, souvent, un droit d’équilibriste dont l’objet vise à concilier deux droits ou principes antagonistes. La confrontation entre le principe de continuité des services publics et le droit de grève des agents publics relève de cette logique. L’arrêt Dehaene, outre qu’il reconnaît la valeur juridique du préambule de la Constitution de 1946, est l’arrêt qui encadre, encore aujourd’hui, cette question, tant pour l’exigence de conciliation qu’il pose que pour la détermination de l’autorité qui en a la charge.

Le principe de mutabilité des services publics (CE, sect., 27/01/1961, Vannier)

Parmi les lois du service public, le principe de mutabilité occupe une place à part. En effet, à la différence des principes de continuité et d’égalité, il apparaît comme profondément tributaire de la vision que l’administration s’en fait, de sorte que les décisions prises sur son fondement peuvent aussi bien accroître la satisfaction des usagers qu’aller dans le sens inverse de ce qu’ils désirent. L’arrêt Vannier relève de la première hypothèse.

La nature du service public d'exploitation des pistes de ski (CE, 19/02/2009, Beaufils)

De nombreux arrêts se veulent l’application fidèle de principes jurisprudentiels dégagés antérieurement. D’autres s’autorisent, au contraire, certains écarts avec ces principes dans un but de politique jurisprudentielle : c’est le cas de l’arrêt Beaufils dont la finalité n’est autre que de simplifier les démarches procédurales des skieurs accidentés.

Etablissements publics à double visage : le trépas évité de peu (CE, 17/05/2013, Voies Navigables de France)

La jurisprudence distingue, traditionnellement, les services publics administratifs (SPA) et les services publics industriels et commerciaux (SPIC) sur la base de trois conditions : l’objet du service, son mode de financement et ses modalités de fonctionnement (CE, ass., 16/11/1956, USIA).  Il est, cependant, des cas où la qualification, soit du service public, soit de l’organe gestionnaire, découle d’un texte. C’est cette hypothèse qui est en cause en l’espèce.

La nature du service public de distribution d’eau (TC, 21/03/2005, Mme Alberti-Scott)

Il est, en droit, des principes intangibles sur lesquels le juge peut, sans peine, s’appuyer. Celui posé en 1921 par le Tribunal des conflits est l’un de ceux-là : dans l’une des rares décisions de la jurisprudence administrative qui se verra dotée d’un surnom, le juge des conflits créait, à côté de la catégorie des services publics administratifs (SPA), celle des services publics industriels et commerciaux (SPIC) et décidait que les litiges nés des rapports qu’ils entretiennent avec leurs usagers relèvent des juridictions de l’ordre judiciaire (TC, 22/01/1921, So. commerciale de l’Ouest africain, dit Bac d’Eloka). Par cette décision, la Haute juridiction ouvrait la voie à une nouvelle problématique : celle de la distinction entre les deux types de services publics. C’est une telle question qui se pose en l’espèce.

La nature du service public d’enlèvement des ordures ménagères (CE, avis, sect., 10/04/1992, SARL Hofmiller)

Il fut un temps où la question de la compétence du juge administratif ne dépendait que du lien du litige avec un service public (TC, 08/02/1873, Blanco). Cette simplicité devait, cependant, s’évaporer lorsque le juge des conflits distingua les services publics administratifs (SPA), majoritairement soumis au droit administratif et à la compétence du juge administratif, et les services publics industriels et commerciaux (SPIC), principalement soumis au droit privé et à la compétence du juge judicaire (TC, 22/01/1921, So. commerciale de l’Ouest africain, dit Bac d’Eloka). Depuis lors, se pose, sans relâche, la question des modalités d’identification de ces services. C’est cette problématique qu’aborde le Conseil d’Etat, en l’espèce, à propos du service public d’enlèvement des ordures ménagères.

Le juge administratif et la police du cinéma (CE, 28/09/2016, Ministre de la culture c/ Ass. Promouvoir)

Il est des requérants qui font des recours contentieux un instrument pour faire valoir leur cause, qu’elle soit de nature politique, sociale ou, encore, religieuse. C’est le cas de l’Association Promouvoir qui a, depuis près d’une vingtaine d’année, multiplié les recours contre certains visas cinématographiques au nom de sa vision traditionnaliste de la société. En l’espèce, c’est le visa accordé au film d’Abdellatif Kechiche La vie d’Adèle : Chapitre 1 et 2 qui fait l’objet des foudres de l’association.