Les buts de l'administration

L'administration exerce deux grandes missions : le service public et la police administrative. Activités d’intérêt général prises en charge par des personnes publiques ou par des personnes privées, les services publics visent à procurer des biens ou des services aux administrés. La police administrative a, elle, pour but d'assurer un certain ordre social en veillant à concilier la préservation de l'ordre public et le respect des libertés publiques.

Police administrative / police judicaire : une distinction fondamentale (CE, sect., 11/05/1951, Consorts Baud ; TC, 07/06/1951, Dame Noualek)

La séparation des fonctions administratives et des fonctions judicaires est une caractéristique fondamentale du système juridique hexagonal. Les premières relèvent du droit administratif et de la compétence du juge administratif, les secondes du droit privé et de la compétence du juge judiciaire. La répartition des compétences entre le premier et le second apparaît, donc, comme une question centrale en droit français. Elle se pose pour les services publics, mais aussi pour les activités de police puisque l’on distingue la police administrative et la police judiciaire. C’est cette question que tranchent le Conseil d’Etat et le Tribunal des conflits dans les deux espèces soumises.

La police administrative spéciale des communications électroniques est exclusive (CE, ass., 26/10/2011, Commune de Saint-Denis)

Le droit est un réseau complexe où s’enchevêtrent des normes et des compétences. Des conflits peuvent apparaître lorsqu’une même situation peut être régie soit par des règles distinctes, soit par deux autorités différentes. C’est la seconde hypothèse qui est en cause dans l’affaire Commune de Saint- Denis où deux polices administratives sont à mêmes d’intervenir.

L’exercice du pouvoir de police administrative est une obligation (CE, 23/10/1959, Doublet)

Certaines affaires qu’a à connaitre le juge administratif donnent, parfois, lieu à de véritables sagas jurisprudentielles qui sont l’occasion pour le juge de préciser des points de droit importants. L’affaire soulevée par M. Doublet est l’une de celles-là : elle permettra, en effet, au Conseil d’Etat de définir, à deux reprises, les contours de l’obligation d’agir pesant sur les autorités de police administrative.

La moralité publique, une composante de l’ordre public (CE, sect., 18/12/1959, Société Les Films Lutétia)

Depuis l’instauration d’un véritable système démocratique, la prise en compte des considérations morales par le droit est regardée comme dangereuse par la doctrine. Le juge lui-même se montre réticent à donner droit de cité à de telles considérations dans sa jurisprudence. Il peut, cependant, arriver qu’il se risque dans cette voie. C’est ce qu’il est advenu dans l’arrêt Société Les Films Lutétia.

Un droit d’accueil minimum au profit des élèves des écoles maternelles et élémentaires (CE, 17/06/2009, Syndicat UNSA et Commune de Brest ; CE, 7/10/2009, Commune du Plessis-Paté)

Le droit des services publics est régi par des lois dites de Rolland, du nom du professeur qui les a systématisées dans les années 1930, c’est-à-dire par plusieurs grands principes organisant et garantissant le fonctionnement de ces activités : il s’agit de la continuité, la mutabilité et l’égalité. De nouveaux principes ont également émergé plus tard dans la jurisprudence, tels que la neutralité, la laïcité et la gratuité.

Les services publics et le droit de l'Union européenne (fiche thématique)

Les Communautés européennes ont été créées à l’origine pour favoriser les échanges, notamment commerciaux, entre leurs Etats membres. Au fur et à mesure qu’elles se développaient, de plus en plus de secteurs économiques ont été affectés. Des principes ont été affirmés, comme ceux de liberté du commerce ou de concurrence loyale. Il était alors inévitable que les services publics en France s’en trouvent impactés.

Le principe d’égalité régissant le fonctionnement des services publics (CE, sect., 09/03/1951, Société des concerts du Conservatoire)

Le service public est reconnu comme l’une des principales activités de l’administration. Dans la loi et dans la jurisprudence administrative, le service public est caractérisé par l’existence de missions d’intérêt général exercées par une personne publique ou une personne privée sous le contrôle d’une personne publique, avec l’application de règles exorbitantes du droit commun. L’existence de prérogatives de puissance publique ou encore d’une intention de l’administration qui délègue l’exercice de ces activités, est également déterminante dans la qualification d’un service public.

La naissance des SPIC, services publics industriels et commerciaux (TC, 22/01/1921, Société commerciale de l’Ouest africain, dit Bac d’Eloka)

En droit administratif, la notion de « service public » émerge comme une des deux activités principales de l’administration aux côtés de la police administrative. Le droit français démontre largement, au fil des dernières décennies, son attachement à ce concept tourné vers la satisfaction de l’intérêt général.

Identification des services publics gérés par des personnes privées : le manuel du Conseil d’Etat (CE, sect., 22/02/2007, A.P.R.E.I. – Ass. du personnel relevant des établissements pour inadaptés)

La notion de service public a émergé de manière considérable en droit administratif français dès le début du XXème siècle. Complexe, cette notion reflète une vision politique particulière de la société française et l’une des deux activités principales de l’administration avec la police administrative. Les services publics se développent ainsi de manière considérable et sans précédent dans notre pays, puis la notion de « service public à la française » émerge notamment à l’ère du « socialisme municipal ». Une notion en pleine évolution, mise à l’épreuve tant par les évolutions sociétales que par le droit de l’Union Européenne qui retient davantage le terme de « service d’intérêt général ».

La police administrative spéciale des OGM est exclusive (CE, 24/09/2012, Commune de Valence)

Depuis plusieurs décennies, la culture d’organismes génétiquement modifiés (OGM) fait face à une méfiance de la part des français et des pouvoirs publics. Déjà dans les années 1980, le Ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche créait une commission chargée d’évaluer les risques de ces pratiques pour l’environnement et la santé publique. La loi du 25 juin 2008 relative aux organismes génétiquement modifiés (Loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 - JORF du 26 juin 2008, p. 10218) est venue renforcer le cadre législatif en la matière, tandis que le débat a refait surface récemment avec l’autorisation par l’Union Européenne de la culture du maïs de Monsanto. Pour autant, en France, aucune culture d’OGM n’est autorisée à l’heure actuelle.

L’affaire Dieudonné : la partition risquée du Conseil d’Etat (CE, ord., 09/01/2014, Dieudonné M'Bala M'Bala)

L’ordonnance Dieudonné constitue, à plus d’un titre, une décision qui mérite attention. D’abord par l’engouement médiatique qu’elle a suscité jusqu’à, pour la première fois de mémoire de l’auteur, rendre inaccessibles les serveurs du site internet du Conseil d’État. Ensuite, parce qu’elle a été rendue, pour la première fois de mémoire de l’auteur, le jour même de la saisine du Conseil d’État. Enfin, parce que tant les principes sur lesquels elle repose que le raisonnement suivi s’écartent de solutions anciennes et établies.

Clap de fin pour la saga des crèches de Noël (CE, ass., 9/11/2016, Fédération de la libre pensée de Vendée ; CE, ass., 9/11/2016, Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne)

Le cycle électoral de 2017 a montré combien les questions liées à l’application de la laïcité occupent une place importante dans le débat public. Assez éloigné des polémiques estivales, c’est sur l’installation des crèches de Noël dans les édifices publics que l’assemblée du contentieux du Conseil d’État vient de prendre position, par deux arrêts du 9 novembre 2016.