Le Conseil d’Etat a longtemps hésité à reconnaître au droit international toute la place que la Constitution du 4/10/1958 lui accorde. Ce n’est qu’en 1989 qu’il a, en effet, par le célèbre arrêt Nicolo, donné sa pleine portée à l’article 55 de la Charte fondamentale en faisant prévaloir les traités internationaux sur les lois mêmes postérieures. L’arrêt SARL du Parc d’activités de Blotzheim constitue l’une des conséquences directes de ce qui constitua, sans aucun doute, un tournant majeur dans la jurisprudence administrative de la fin du XX° siècle.

Dans cette affaire, le Gouvernement français et le Conseil fédéral suisse ont signé le 4/07/1949 une convention en vue de la construction et l’exploitation de l’aéroport de Bâle-Mulhouse, à laquelle sont annexés un statut ainsi qu’un cahier des charges. Ces textes prévoyaient qu’en cas d’insuffisance des installations, les terrains nécessaires à l’agrandissement de l’aéroport seraient acquis par l’Etat français et que les conditions de cette extension seraient déterminées par un avenant audit cahier des charges. Sur cette base, les deux parties ont conclu, les 12 et 29 février 1996, un accord sous forme d’échange de notes prononçant l’extension dudit aéroport. Par un décret du 13/05/1996, le président de la République a procédé à la publication de cet accord. La SARL du Parc d’activités de Blotzheim et la SCI Haselaecker ont, alors, saisi le Conseil d’Etat afin d’en obtenir l’annulation. Le 18/12/1998, la Haute juridiction a, par un arrêt d’assemblée, rejeté ces requêtes.

L’argumentaire des deux sociétés était organisé en deux branches. La première, celle qui donne tout son intérêt à la décision du Conseil d’Etat, invitait la Haute juridiction à examiner la régularité de la procédure de ratification de l’accord de 1996. La Constitution de 1958 prévoit, en effet, que certaines conventions internationales, dont fait partie ledit accord, doivent être ratifiées par le législateur. Or, jusqu’à présent, le juge administratif ne s’était jamais reconnu le pouvoir d’examiner le respect de cette exigence constitutionnelle, qui est, pourtant, l’une des conditions de l’autorité des traités sur les lois. Cette position était, cependant, appelée à évoluer une fois la jurisprudence Nicolo rendue : c’est chose faite avec l’arrêt du 18/12/1998.

La position du Conseil d’Etat est, en revanche, toute autre s’agissant des deux autres moyens soulevés. Il lui était, en effet, demandé d’examiner la régularité de décisions prises préalablement à la conclusion de l’accord de 1996, ainsi que la validité de ce dernier au regard de la Convention de 1949. Or, il est de jurisprudence constante que le juge administratif ne peut contrôler les actes touchant aux relations internationales de la France. La Haute juridiction s’estime donc, cette fois-ci, incompétente pour apprécier ces arguments.

Il convient donc de démontrer, dans une première partie, en quoi le juge administratif est apte à contrôler la régularité de la procédure de ratification d’un traité (I) et de comprendre, dans une seconde partie, pourquoi celui-ci considère qu’il ne lui appartient pas d’examiner les actes liés aux relations internationales (II).

  • I – Un juge apte à contrôler la procédure de ratification d’un traité
    • A – L’encadrement constitutionnel de la ratification d’un traité
    • B – Le contrôle accru de la ratification d’un traité
  • II – Un juge inapte à contrôler les actes liés aux relations internationales
    • A – Une solution applicable aux actes internes à dimension internationale
    • B – Une solution applicable aux traités internationaux
  • CE, ass., 18/12/1998, SARL du Parc d’activités de Blotzheim

Télécharger