Au long du XXe siècle, la communauté internationale a mis en place de plus en plus de juridictions pour régler les différends entre Etats par le droit et non plus la guerre. Afin de garantir leur indépendance, les fonctionnaires de ces organisations internationales bénéficient de certaines garanties et avantages, dont l’immunité fiscale.

Monsieur Stanisas Aquarone était greffier de la Cour internationale de Justice (CIJ). A sa retraite, il a perçu une pension versée par la caisse commune du personnel de l’Organisation des Nations Unies (ONU) dont dépend la CIJ. En tant qu’ancien fonctionnaire international, Monsieur Aquarone se considérait comme n’étant pas soumis à l’imposition française. D’autant plus qu’il vit en France mais il est de nationalité autrichienne. L’administration fiscale française a cependant réclamé qu’il paie l’impôt sur le revenu de sa pension de 1981 à 1986.

M. Aquarone a contesté cette réclamation devant le tribunal administratif de Marseille – qui a rejeté sa requête - puis en appel devant la Cour administrative d’appel de Lyon. Celle-ci a également rejeté sa requête le 5 avril 1993. M. Aquarone a alors saisi le Conseil d’Etat pour faire annuler l’arrêt de la Cour d’appel. Dans son arrêt du 6 juin 1997, le Conseil d’Etat, réuni en Assemblée, a rejeté la requête de M. Aquarone.

Pour contester son imposition, M. Aquarone revendique l’application du paragraphe 8 de l’article 32 du statut de la CIJ qui prévoit que les traitements, allocations et indemnités sont exempts d’impôt. La Cour administrative d’appel relève que ces exemptions ne concernent pas les pensions de retraite. M. Aquarone fait également valoir qu’il existe une coutume internationale exonérant les pensions de retraite de l’imposition. La Cour administrative d’appel relève que cette coutume n’existe pas et que le cas échéant, la coutume internationale ne peut de toute façon pas contrevenir à une loi française. Le Conseil d’Etat dans son arrêt du 6 juin 1997 confirme la position du juge d’appel et rejette la requête de Stanislas Aquarone.

Les questions que soulèvent cet arrêt sont de savoir si une coutume internationale peut trouver à s’appliquer en droit interne et, dans l’affirmative, si elle peut contredire une loi française ? Plus généralement, il faut se demander quelle est la place et la portée de la coutume internationale dans l’ordre juridique interne.

Le Conseil d’Etat répond à la première question par la positive et à la seconde par la négative. Ainsi, il prend en compte la coutume internationale dans sa jurisprudence (I). Mais cette prise en compte à une portée limitée (II).

  • I - La prise en compte de la coutume internationale dans la jurisprudence administrative
    • A - La reconnaissance de la coutume internationale
    • B - La place de la coutume internationale dans l’ordre interne
  • II – La portée limitée du droit international non-conventionnel en droit interne
    • A -  Le contrôle de conformité en partie influencé par la coutume internationale
    • B - Une jurisprudence transposable mais avec des limites
  • CE, ass., 6/06/1997, Aquarone

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