« La dissolution parlementaire est un instrument au service de la stabilité institutionnelle et de l'équilibre des pouvoirs. » Cette réflexion de Maurice Duverger, illustre l'importance de cet outil constitutionnel dans l’équilibre des pouvoirs sous la Ve République. Cependant si la dissolution a initialement un rôle de stabilisation au sein de notre régime elle a pu devenir, au fil de ses utilisations, une cause de confrontation politique. Nous explorerons ainsi dans la présente dissertation ces diverses facettes de la dissolution sous la Ve République.

La dissolution parlementaire, dans son acception générale, consiste pour le chef de l'État à mettre fin prématurément au mandat de l’Assemblée législative élue. Sous la Ve République plus particulièrement, l’article 12 de la Constitution confère au Président de la République un pouvoir propre de dissolution de l’Assemblée nationale, sans contreseing ministériel, lui permettant de convoquer de nouvelles élections législatives. Toutefois, ce pouvoir n’est pas absolu, puisqu’il ne peut être exercé dans l’année suivant une dissolution précédente, en période d’application des pouvoirs exceptionnels du président de la République découlant de l’article 16 de la Constitution ou lorsque le Président du Sénat exerce la fonction de Président de la République par interim.

Historiquement la dissolution existe dans l’arsenal constitutionnel français depuis 1802 et le Premier Empire, où elle fut introduite dans la Constitution de l’an X par Napoléon Bonaparte. Elle a ensuite traversé les régimes politiques successifs puisqu’on la retrouve sous la Restauration (charte de 1814), la monarchie de Juillet (charte de 1830), le Second Empire, la IIIe République (lois constitutionnelles de 1875) et la IVe République (Constitution de 1946). Aujourd’hui elle perdure sous la Ve République (article 12 de la Constitution de 1958). Dans le contexte de l’instauration d’un régime parlementaire rationalisé elle a été conçue comme un contrepoids au pouvoir législatif et un instrument central dans l’équilibre des pouvoirs. En pratique la dissolution a été utilisée six fois sous la Ve République (1962, 1968, 1981, 1988, 1997 et 2024).

Dès lors la présente dissertation tentera de déterminer dans quelle mesure la dissolution de l’Assemblée nationale a été un levier de renforcement ou au contraire un révélateur des fragilités du régime politique de la Ve République.

Pour ce faire, cette étude s’intéressera dans un premier temps aux dissolutions successives sous la Ve République, en explorant leurs contextes, motivations et résultats (I). Elle analysera ensuite leurs conséquences politiques et institutionnelles pour le régime (II).

  • I - Les dissolutions de l’Assemblée nationale sous la Ve République : contextes et motivations
    • A - Les dissolutions motivées par une stratégie de légitimation présidentielle
    • B - Les dissolutions motivées par des enjeux stratégiques électoraux
  • II - Les conséquences institutionnelles et politiques des dissolutions
    • A - Le renforcement de la stabilité politique et institutionnelle
    • B - Les limites de la dissolution et le risque de confrontation politique

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