Comme le rappelle le Professeur Didier Truchet, « le contrat a toujours été l’un des instruments d’action de l’Administration. Historiquement, il a été surtout utilisé par elle d’une part pour se procurer des biens et des services sur le marché (marchés publics), d’autre part pour déléguer à un opérateur (généralement privé) une mission de travail public ou de service public (concessions), enfin pour autoriser certaines occupations du domaine public » (Didier Truchet, Droit administratif, Coll. Thémis, PUF, 2017, p. 275). Les litiges nés de la conclusion ou de l’exécution de ces contrats relèvent des juridictions administratives, pour ceux qui sont qualifiés de contrats administratifs et du juge judiciaire pour les contrats de droit privé. Depuis quelques dizaines d’années, le droit de la commande publique, mais aussi les règles du contentieux des contrats administratifs, ont largement évolué.

En l’espèce, la commission permanente du Conseil départemental (Conseil général à l’époque) de Tarn-et-Garonne a autorisé son président, par une délibération en date du 20 novembre 2006, à signer avec la société Sotral un marché à bons de commande ayant pour objet la location de véhicules de fonction, en longue durée, pour les services de la collectivité. En janvier 2007, Monsieur François Bonhomme, conseiller général, a contesté cette délibération devant le tribunal administratif (TA) de Toulouse, dans le cadre d’un recours en excès de pouvoir. Le TA de Toulouse a annulé cette délibération, par un jugement du 20 juillet 2010 (n° 0700239). Une décision confirmée par la Cour administrative d’appel (CAA) de Bordeaux, dans un arrêt du 28 février 2012 (n° 10BX02641). Le département de Tarn-et-Garonne a alors demandé au Conseil d’État d’annuler cet arrêt, contestant les prétentions de l’élu qui arguait notamment d’une méconnaissance de certaines règles de la commande publique, de vices en termes de publicité et de mise en concurrence, mais aussi d’une absence d’information suffisante à destination des élus de la Commission permanente. Malgré tout, la Haute-juridiction annule l’arrêt de la CAA de Bordeaux et le jugement du TA de Toulouse, considérant que la délibération respectait les règles en vigueur et ne comportait pas d’illégalité susceptible en tout cas d’engendrer une annulation de la délibération en question. En effet, le Conseil d’État considère qu’en l’espèce, le vice présent en matière de publicité et de mise en concurrence « n’a été susceptible, (…) ni d’exercer une influence sur le sens de la délibération contestée ni de priver d’autres candidats d’une garantie » (v. aussi CE Ass., 23 décembre 2011, Danthony, n° 335033).

Au-delà du fond, le Conseil d’État profite de cet arrêt pour renouveler, en profondeur, les voies de recours ouvertes aux tiers à l’encontre des contrats administratifs (I). Pour autant, il laisse également ouverte la voie des autres recours auparavant accessibles, en appliquant cette nouvelle solution uniquement aux contrats conclus à l’avenir (II).

  • I – L’ouverture du recours de pleine juridiction aux tiers à un contrat administratif
    • A - Un recours de pleine juridiction rapprochant tiers et parties dans le contentieux des contrats
    • B - Les conditions et obligations particulières attachées à ce nouveau recours
  • II – La persistance du contentieux en excès de pouvoirs auparavant accessible
    • A - Le recours en excès de pouvoir : une modulation de Tarn-et-Garonne dans le temps
    • B - Des exceptions permettant l’admission du recours pour excès de pouvoir
  • CE, ass., 04/04/2014, Département de Tarn-et-Garonne

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