La responsabilité pour faute suppose, en principe, que la victime prouve que l’administration a commis une faute pour que sa responsabilité soit engagée. Certains secteurs de l’action administrative sont, toutefois, régis par un régime de présomption de faute. Tel est le cas des dommages du fait des travaux publics ou des ouvrages publics causés à leurs usagers. C’est un tel dommage qui est cœur de l’affaire objet du présent commentaire.

En l’espèce, Mme B a été heurtée, le 12 juillet 2017, alors qu’elle circulait en voiture sur la place Maurice Faure de la commune de Romans-sur-Isère, par une borne escamotable du fait de la remontée de cette dernière lors de son passage. L’intéressée a demandé, devant le tribunal administratif de Grenoble, la condamnation in solidum de la communauté d'agglomération Valence Romans Agglo, de la commune de Romans-sur-Isère et de la SMACL afin d’obtenir la réparation, d'une part, des préjudices financiers résultant des dommages causés à son véhicule, et d'autre part, de ses préjudices corporels ainsi que des troubles dans ses conditions d'existence. Mais, par un jugement du 11 août 2020, celui-ci a rejeté cette demande. Mme B a, alors, contesté cet arrêt devant la cour administrative d’appel de Lyon. Son président a, toutefois, en vertu de l’article R. 351-2 du code de justice administrative en vertu duquel « lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'État, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'État qui poursuit l'instruction de l'affaire », renvoyé l’affaire devant le juge administratif suprême par une ordonnance du 24 novembre 2020. Par un arrêt du 25 octobre 2021, la Haute juridiction a censuré l’arrêt des juges de première instance au motif qu’ils ont, à tort, retenu le fait d’un tiers pour écarter la responsabilité de la commune de Romans-sur-Isère.

Cette décision concerne l’indemnisation d’un dommage causé par un ouvrage public à l’une de ses usagers. En la matière, le régime de responsabilité applicable est un régime de faute présumée. En d’autres termes, le juge administratif considère que les préjudices subis par les usagers proviennent, en principe, de l’ouvrage public et que l’administration est présumée avoir commis une faute. Cette dernière peut, toutefois, voir sa responsabilité écartée si elle parvient à démontrer qu’elle a normalement entretenu l’ouvrage. Il en va de même si elle justifie d’une cause exonératoire. Parmi celles-ci, se trouve le fait du tiers, mais cette cause n’est pas, en matière de dommage de travaux publics causés aux usagers, admise par le juge comme le rappelle le Conseil d’Etat en l’espèce.

Il convient, donc, d’étudier la responsabilité du fait des dommages de travaux publics dont bénéficient les usagers, d’abord, sous l’angle des principes qui la régissent (I) et, ensuite, au travers des limites qui l’encadrent (II).

  • I – Les principes régissant la responsabilité du fait des dommages de travaux publics dont bénéficient les usagers
    • A – Un régime fondé sur la faute présumée
    • B – Un régime aux contours strictement définis
  • II – Les limites de la responsabilité du fait des dommages de travaux publics dont bénéficient les usagers
    • A – Une portée limitée par le caractère réfragable de la présomption de faute
    • B – Une portée limitée par l’existence de causes exonératoires, hors fait du tiers
  • CE, 25/10/2021, Mme B, n°446976

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