Le contrôle de la légalité administrative justifie l’existence de la juridiction administrative. Depuis la création du Conseil du Roi à l’intégration européenne et au constitutionnalisme des droits de l’Homme, rendus possibles par l’établissement de la justice déléguée en 1872, l’office du juge administratif s’est largement renouvelé pour s’adapter aux évolutions de la société. L’arrêt CE, Ass., 23 décembre 2011, Danthony, req. n°335033 en est l’illustration parfaite.
Par décret en date du 10 décembre 2009, le Gouvernement a décidé la création de l’École normale supérieure de Lyon. Le décret litigieux a été adopté suite à la demande du regroupement des Écoles normales supérieures de Lyon et de Fontenay-Saint-Cloud. L’article L.711-1 du Code de l’éducation autorisait un tel regroupement, mais les dispositions de l’article 15 de la loi du 11 janvier 1984 et l’article 12 du décret du 28 mai 1982 imposaient que la demande préalable des directeurs des écoles soit précédée d’un avis des comités techniques paritaires de chacun des établissements. Il ressort des pièces du dossier que d’une part, ces comités techniques paritaires n’ont été consultés que postérieurement à la demande de regroupement et que, d’autre part, les conseils d’administration de ces deux écoles n’ont pas délibéré séparément, mais lors d’une réunion commune.
Plusieurs requérants ont contesté la légalité du décret devant le juge de l’excès de pouvoir du Conseil d’État, compétent en premier et dernier ressort, s’agissant d’un acte à portée nationale. Bien qu’il s’agissait d’une opposition de fond au regroupement, ils ont argué des vices ayant entaché la procédure pour présenter leurs conclusions aux fins d’annulation du décret. Le Conseil d’État profite de cet arrêt pour renouveler son office dans le contrôle de la légalité externe des actes administratifs unilatéraux, regroupés sous les catégories de vices de procédure et de forme. Il répond donc à la question relative aux conditions dans lesquelles de tels vices sont de nature à conduire à l’annulation des actes administratifs unilatéraux.
Par un considérant de principe particulièrement riche dans ses fondements, il tente de fonder un équilibre entre respect de la légalité et efficacité de l’action administrative (I). Dans la lignée de sa jurisprudence récente, il applique également un principe de tempérance fondé sur des considérations pratiques dans le prononcé de sa solution (II).
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I - Une redéfinition de l’office du juge
- A - La légalité externe, formalisme inutile ou garant de la légalité ?
- B - Une solution pragmatique
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II - Les indices d’un principe de tempérance
- A - Une application modérée d’un principe équilibré
- B - L’application de la jurisprudence AC !
- CE, ass., 23/12/2011, Danthony