D’après une enquête réalisée par l’Ifop, les Français sont majoritairement favorables à l’autorisation de la gestation pour autrui, pour les couples hétérosexuels (75%) comme homosexuels (60%). Toutefois, cette pratique étant interdite à ce jour, les Français intéressés sont contraints d’y recourir à l’étranger, ce que fut le cas de M. E et M. Q dont l’affaire a été jugée par la première chambre civile de la Cour de cassation, le 4 novembre 2020 (n°19-15.39).

M. E a donné naissance à l’enfant U, par gestation pour autrui, réalisée au Mexique, avec pour mère porteuse Mme L, grâce à un don d’ovocyte. M. Q, époux de M. E, après avoir obtenu l’accord de ce dernier, a demandé l’adoption plénière de cet enfant, le 11 juillet 2016.

Après une requête formée devant le Tribunal de 1ère instance compétent donnant lieu à un premier jugement, un appel a été interjeté.

Le 26 février 2019, la Cour d’appel de Paris a rejeté la demande d’adoption plénière, en considérant que la preuve n’était pas apportée de la renonciation de Mme L. à ses droits sur l’enfant au profit de M. Q, et de la connaissance qu’elle détenait sur les conséquences d’une telle renonciation dès lors qu’elle en avait accouché, quand bien même il ne s’agissait pas de son propre ovocyte.

M. Q forme alors un pourvoi en cassation, en énonçant que Mme L. n’était pas la mère biologique de l’enfant et n’avait donc aucun droit sur l’enfant. Par ailleurs, la convention de gestation pour autrui était conforme à la législation mexicaine, et tous les documents nécessaires étaient accessibles et communiqués, à commencer par l’acte de naissance établi par l’officier d’état civil mexicain.

La Cour de cassation a donc dû s’interroger sur la question suivante : L’époux dont le mari a recouru à la gestation pour autrui à l’étranger peut-il faire reconnaitre son lien de filiation par une adoption plénière ?

Au visa des articles 16-7, 353 alinéa 1er, 345-1 1° et 47 du Code civil, la Cour de cassation, après avoir rappelé l’interdiction de principe de la convention de gestation pour autrui, a cassé et annulé l’arrêt rendu par la Cour d’appel en accordant la possibilité à M. Q d’adopter l’enfant U par la voie de l’adoption plénière, puisqu’une telle convention est conforme au droit mexicain.

Ainsi, si la Cour de cassation maintient le principe d’interdiction de la convention de gestation pour autrui (I), elle en amenuise les effets en permettant que soit établi le lien de filiation entre le père de ce dernier et son mari, par la voie de l’adoption plénière (II).

  • I – Le maintien théorique du principe d’interdiction de la gestation pour autrui
    • A – La réaffirmation du principe d’interdiction de la gestation pour autrui
    • B – Le champ de l’interdiction délimité territorialement
  • II – L’affaiblissement pratique du principe d’interdiction de la gestation pour autrui
    • A – L’admission explicite de l’adoption plénière
    • B – L’adoption plénière comme seule voie de reconnaissance du lien de filiation
  • C. Cass., 1ère civ., 4 novembre 2020, n°19-15.39

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