Selon Charles de Gaulle, « Une Constitution, c'est un esprit, des institutions, une pratique ». Si l’esprit et la pratique restent vivants, les institutions françaises semblent, elles, figées depuis les dernières révisions d’importance en 2008. »
De manière générale, une révision constitutionnelle consiste à modifier le texte d’une Constitution selon une procédure prévue par la loi ou par la Constitution elle-même pour l'adapter à des évolutions politiques, sociales ou juridiques. Une Constitution peut être qualifiée de souple si sa procédure de révision est identique à celle de l’adoption d’une loi ordinaire ou de rigide si cette révision obéit à une procédure spéciale plus lourde. En France la Constitution de la Ve République est rigide et la révision obéit à une procédure spéciale prévue par l'article 89. La révision nécessite d’abord un vote en termes identiques par les deux chambres du Parlement puis une adoption à la majorité des 3/5ème par le Parlement réuni en Congrès ou par référendum. Il est à noter que le référendum est obligatoire en cas de proposition de révision (émanant du Parlement), la voie du Congrès étant possible uniquement en cas de projet de révision (émanant du Président de la République).
La Constitution de la Ve République, adoptée en 1958, a connu 25 révisions. Certaines furent fondamentales, telles que l'introduction de l'élection présidentielle au suffrage universel en 1962 ou la réduction du mandat présidentiel à cinq ans en 2000. En parallèle, 14 projets ou propositions de révision ont échoué, illustrant les limites de la procédure actuelle, surtout depuis la dernière révision majeure de 2008. La récente révision de mars 2024, inscrivant le droit à l’IVG dans la Constitution, constitue une exception par sa portée limitée à une question sociétale précise. Il faut également noter que dans l’histoire de la Ve République la révision constitutionnelle a également été effectuée par la voie de l’article 11 de la Constitution, à l’initiative de Charles de Gaulle en 1962 et 1969. Cependant l’utilisation de cet article, qui permet au Président de la République de proposer à référendum un projet de loi, a soulevé d'importantes controverses puisqu’il permet de contourner le Parlement et ne répond pas à la procédure spécifiquement prévue par la Constitution pour la révision.
Dans le cadre de la présente dissertation nous tenterons de répondre à la problématique suivante : pourquoi les tentatives de révision constitutionnelle en France depuis 2008 ont-elles échoué, malgré des enjeux importants, et que révèle cet échec sur les blocages institutionnels de la Ve République ?
Pour répondre à cette question, nous examinerons tout d’abord les principales tentatives de révision constitutionnelle depuis 2008 et les raisons de leur échec (I). Puis, nous analyserons les enseignements de ces échecs sur le fonctionnement des institutions et les perspectives pour la Constitution de la Ve République (II).
- I - L’échec des révisions constitutionnelles depuis 2008 : raisons et contexte
- A - Les grandes tentatives de révision depuis 2008
- B - Les raisons variées de l’échec des révisions constitutionnelles
- II - Les enseignements des échecs des révisions constitutionnelles et les perspectives d’avenir pour la Ve République
- A - Une constitution rigide et des institutions fragilisées
- B - La possibilité d’une refondation des pratiques institutionnelles et politiques en matière de révision constitutionnelle