Selon la formule du Professeur Guy Carcassonne, « une bonne Constitution ne peut suffire à faire le bonheur d’une nation. Une mauvaise peut suffire à faire son malheur ». Cette citation montre bien l’importance de l’équilibre entre une Constitution suffisamment souple pour s’adapter au temps et aux mœurs pour ne pas devenir « mauvaise » et une Constitution suffisamment rigide pour résister aux potentielles velléités de modifications par certains gouvernements, risquant de faire le malheur d’une nation.

La Constitution est l’ensemble des lois fondamentales d’un Etat qui définissent les droits et les libertés des citoyens ainsi que l’organisation et les séparations du pouvoir politique. La révision constitutionnelle définit la procédure juridique particulière par laquelle la constitution voit une ou plusieurs de ses dispositions modifiées. Elle implique l’intervention du pouvoir constituant dérivé qui déclenche une procédure juridique spécifique. En matière de révision constitutionnelle il faut distinguer les Constitutions souples et les Constitutions rigides. Une Constitution rigide ne peut être modifiée que selon une procédure spéciale différente de celle de la loi ordinaire. Une Constitution souple peut être plus facilement modifiée, par exemple par une loi ordinaire. La Constitution de la Ve République est ainsi à titre d’exemple une Constitution rigide pouvant être modifiée par une procédure spéciale prévue par son article 89.

Le principe des révisions constitutionnelles a été posé dès les premières constitutions écrites. Pourtant, leur modification est à utiliser avec parcimonie afin de garantir une stabilité constitutionnelle de l’Etat. Ainsi, les procédures de révisions doivent être suffisamment complexes, même si cette complexité peut empêcher une possible révision, à l’instar de la Constitution de 1791 en France qui posait des conditions de révision trop compliquées à mettre en œuvre. En ce qui concerne la Constitution de la Ve République, elle a été modifiée vingt-quatre fois au total depuis 1958. Les réformes constitutionnelles se sont accélérées en France à partir des années 1990. Ces réformes n’ont pas été toutes de même nature, certaines ont modifié le texte plus ou moins profondément, et ont eu un impact plus ou moins fort sur la vie politique. Par exemple, l’adoption en 1962 de la réforme visant à élire le Président de la République au suffrage universel direct a durablement transformé les usages institutionnels. De même, le passage du septennat au quinquennat en 2000 est l’une des réformes constitutionnelles les plus marquantes de la vie politique française. Ces réformes ont accompagné la modernisation des institutions dans de nombreux domaines, tels que la décentralisation, la construction européenne ou l’évolution de la société. La dernière réforme constitutionnelle date de juillet 2008. Le Président Emmanuel Macron voulait également proposer une réforme constitutionnelle, cependant ce projet a été repoussé suite à l’opposition du Sénat.

Les révisions constitutionnelles permettent à la loi fondamentale de s’adapter aux contextes socio-politiques et de perdurer dans le temps. Cependant, elles font souvent l’objet de vifs débats sur les motivations qui les portent et les effets qu’elles engendrent. C’est pourquoi, il est cohérent de se demander quelles sont les caractéristiques et les faiblesses d’une Constitution rigide comparativement à une Constitution souple.

Le propos s’articulera autour de deux idées principales. D’une part on peut noter que la rigidité de la Constitution permet de préserver son texte des tentatives de modification pouvant dénaturer son texte (I). D’autre part, il conviendra de voir que la souplesse de la Constitution permet son adaptation au temps et à l’évolution de la société malgré les risques de détournement politique des révisions constitutionnelles (II).

  • I - La rigidité de la Constitution comme garantie de préservation de la norme suprême
    • A - Une Constitution rigide caractérisée par une procédure de révision complexe à mettre en œuvre
    • B - La nécessaire rigidité d’une Constitution pour garantir le respect de la hiérarchie des normes
  • II - La souplesse de la Constitution comme garantie de son adaptation au temps et à l’évolution de la société malgré les risques de détournement politique de la révision constitutionnelle
    • A - L’assouplissement des Constitutions écrites au regard de la rareté des Constitutions coutumières
    • B - Le risque de détournement politique de la révision constitutionnelle, ou « le divorce presque constant […] entre lapparence juridique et la réalité politique »

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