Les sources de la légalité

Les sources de la légalité administrative correspondent à l'ensemble des règles qui encadrent l'activité de l'administration. Même si la jurisprudence du Conseil d’État conserve un rôle central en la matière (au travers des PGD, notamment), la Constitution de 1958 et le droit international, avec au premier rang le droit communautaire et le droit européen, y ont pris une place croissante depuis 1958. A côté, la loi et le règlement apparaissent comme des sources mineures du droit administratif.

Les régimes textuels d'exception (fiche thématique)

Lorsque la France est confrontée à de graves crises, l’Etat a la possibilité d’instaurer des régimes d’exception. Ces régimes permettent aux autorités publiques d’obtenir davantage de pouvoirs qu’en temps normal afin de résoudre les difficultés rencontrées par le pays. Les gouvernants n’obtiennent pour autant pas un blanc-seing pour agir à leur guise. La mise en œuvre de ces régimes et les pouvoirs qu’ils confèrent sont encadrés juridiquement.

Actes de Gouvernement : l’abandon de la théorie du mobile politique (CE, 19/02/1875, Prince Napoléon)

Rares sont les théories aussi décriées, aussi mal admises, tant par la jurisprudence qui, si elle en préserve le régime, refuse d’en prononcer le nom, que par la doctrine, qui n’y voit que la survivance d’un archaïsme juridique dont il faudrait se défaire, que celle des actes de Gouvernement. On la rattache traditionnellement à l’arrêt CE, 19 février 1875, Prince Napoléon

Les actes de gouvernement dans la sphère interne (CE, sect., 25/09/1998, M. Mégret ; CE, ass., 9/04/1999, Mme. Ba)

Depuis l’aube du droit administratif, le contrôle qu’exerce le Conseil d’Etat sur l’action de l’administration n’a cessé de s’étendre. D’une réserve plus que marquée au départ, la Haute juridiction a progressivement accru les exigences légales pesant sur la puissance publique et s’est, dans le même temps, dotée des outils à même de les faire respecter. Pourtant, malgré ces avancées, il reste, encore aujourd’hui, des actes qui échappent à son emprise. Les actes de Gouvernement sont de ceux-là. Ils se manifestent principalement dans deux domaines : les rapports entre les pouvoirs publics constitutionnels et la conduite des relations internationales de la France. Les arrêts M. Mégret et Mme. Ba concernent la première de ces hypothèses.

Les actes de gouvernement dans la sphère internationale (CE, ass., 29/09/1995, Ass. Greenpeace France ; CE, 8/12/1995, M. Lavaurs et autres)

L’autonomie de la juridiction administrative est clairement reconnue aujourd’hui en droit français. Ainsi, en 1790, la loi interdisait déjà au juge judiciaire de connaitre des actes et litiges de l’administration (loi du 16 et 24 août 1790). Le Conseil Constitutionnel reconnait même un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) dans l’indépendance des juridictions administratives (Décision n° 80-119 DC du 22 juillet 1980).

Une histoire du règlement, de 1789 à nos jours (fiche thématique)

Les règlements constituent, avec les lois, l'une des formes d'exercice du pouvoir d'édiction des normes générales et impersonnelles. En effet, alors que les décisions individuelles visent une ou plusieurs personnes nominativement désignées, les règlements s'adressent, eux, à des sujets de droit indéterminés. Bien que se situant dans la frange inférieure de la pyramide des normes, ils constituent une source à part entière du droit administratif dont la place est, d'ailleurs, allée en s'accroissant à mesure que les prérogatives du pouvoir exécutif s'affirmaient. L'histoire du règlement, apparaît, ainsi, consubstantiellement liée à celle des autorités administratives, de sorte que les bouleversements qui les ont traversés ont irrémédiablement impacté le pouvoir réglementaire lui-même. L'on peut en dénombrer deux.

Décrets en conseil des ministres, un chef de l’État compétent quoi qu'il en soit (CE, ass., 10/09/1992, Meyet)

La problématique de la répartition du pouvoir réglementaire entre le chef de l’État et le Premier ministre semblait avoir été suffisamment encadrée par la Constitution de 1958. C'était sans compter l'opportunisme de certains occupants de la magistrature suprême qui n'ont eu de cesse que d'user des moindres failles de la Charte fondamentale pour accroître les maigres prérogatives réglementaires que celle-ci leurs avaient confiés. L’arrêt Meyet vient consacrer la démarche qui a été la leurs et réviser, dans le même temps, une jurisprudence vieille d'à peine cinq ans.

Les ministres, des autorités réglementaires à la marge (CE, sect., 07/02/1936, Jamart)

Il est des arrêts dont la postérité ne vient pas de la solution d'espèce, mais de la motivation qui l'accompagne. L’arrêt Jamart est l'un de ceux-là : par un considérant de principe qui rend la décision retenue au fond anecdotique, le Conseil d’État surprend les commentateurs et reconnaît aux ministres un pouvoir réglementaire en matière d'organisation des services publics.

Le pouvoir réglementaire de police générale du chef de l’État (CE, 08/08/1919, Labonne)

Si les autorités chargées d'exercer le pouvoir de police administrative générale au niveau local ont, très tôt, été désignées par les textes, il n'en a pas été de même s'agissant de l'échelon étatique. En effet, sous la III° République, aucun texte ne déterminait l'autorité compétente au niveau national. L’arrêt Labonne de 1919 vient combler cette lacune en reconnaissant au président de la République un pouvoir réglementaire de police générale propre.

Conseil d'Etat, CJUE et CEDH : les voies du dialogue (fiche thématique)

Il fut un temps où le cloisonnement des différentes branches du droit condamnait les juges au monologue. L’ouverture du droit national vers des sources étrangères devait, cependant, bouleverser ce paysage. En effet, à partir du moment où la règle à appliquer devient commune à différents ordres juridiques et où sont mis en place des juridictions supranationales chargées, elles-aussi, d’en assurer le respect, le dialogue des juges devient une nécessité.

Le droit dérivé de l'Union européenne (fiche thématique)

Le droit de l’Union Européenne (UE) a pris une place de plus en plus importante dans notre ordre juridique national, au fil de la construction européenne, se hissant à la plus haute place de notre hiérarchie des normes. C’est en 1964 que la Cour de justice des communautés européennes (CJCE, devenue aujourd’hui la Cour de justice de l’UE), a précisé que « le transfert opéré par les États, de leur ordre juridique interne au profit de l’ordre juridique communautaire, des droits et obligations corres-pondant aux dispositions du traité, entraîne donc une limitation définitive de leurs droits souve-rains contre laquelle ne saurait prévaloir un acte unilatéral ultérieur incompatible avec la notion de Communauté » (CJCE, 15 juillet 1964, Costa c/ Enel, aff. 6/64). Aussi, elle a pu préciser quelques années plus tard, que « tout juge national (…) a l’obligation d’appliquer intégralement le droit communautaire et de protéger les droits que celui-ci confère aux particuliers, en laissant inappliquée toute disposition éventuellement contraire de la loi nationale » (CJCE, 9 mars 1978, Adm. Des finances de l’Etat c./ SA Simmenthal, aff. 106/77).

Le contrôle du respect du droit européen limité par une nouvelle réserve de constitutionnalité (CE, ass., 21/04/2021, French Data Network et autres)

L’histoire croisée du droit administratif et du droit international, surtout lorsqu’il s’agit du droit spécifique qu’est le droit de l’Union européenne (UE), pouvait paraître close avec un certain nombre de décisions rendues dans les années 2000. L’arrêt French Data Network atteste que les dernières lignes de cette épopées sont, sans aucun doute, loin d’avoir été écrites.

Le contrôle des actes internes de transposition des directives devant le Conseil d’État (CE, ass., 08/02/2007, Société Arcelor Atlantique et Lorraine et CE, sect., 10/04/2008, Conseil national des Barreaux)

Le droit de l’Union européenne, et avant lui celui des Communautés européennes, a su prendre, dans l’ordre juridique interne, une place particulière. Particulière, d’abord, parce que la grande majorité des lois votées aujourd’hui en France le sont en vue de transposer des actes européens. Particulière ensuite, parce que les mécanismes d’intégration dont il jouit sont inédits et spécifiques. On en trouvera deux exemples éclairants dans les arrêts CE, Ass, 2007, Société Arcelor Atlantique et Lorraine et CE, Sect, 2008, Conseil national des Barreaux.